Les distractions de la tranchée
La plus amusante est la chasse au lièvre. Quand il en passe un dans la zone qui sépare les Français des Boches, c'est de part et d'autre une vive fusillade. Le plus souvent, le lièvre reste sur le carreau. S'il tombe du côté français, un des nôtres saute hors de la tranchée, court le ramasser : pas un Allemand ne tire. S'il tombe du côté allemand, c'est un des leurs qui va le prendre et qu'on laisse tranquille. Mais s'il arrive que le lièvre meure au milieu du champ, Français et Allemands de courir dessus, à qui l'aura le premier, et alors la fusillade de crépiter. A moins que les Boches ne fassent signe qu'ils abandonnent le gibier - comme l'autre jour, où l'un d'eux montrant le lièvre étendu, expliqua de loin qu'il y renonçait, en criant :
" Tabac ! Tabac ! "
Les nôtres comprirent : un petit soldat bondit hors de son trou, courut à l'animal et mit à sa place un paquet de scaferlati. Ce soir-là encore, dans la tranchée, on mangea du lièvre...
source : bulletin des armées de la République - 1915