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19 septembre 2008

Repos des guerriers

reve_musical

Dans ses mémoires, Georges HUBIN relate un épisode surprenant en voici l'extrait :

[...] Dans la troupe, malgré les défenses formelles ou soi-disant telles, de nombreuses épouses légitimes et non légitimes avaient trouvé le moyen de se faufiler dans les villages. Les consignes avaient été faciles à tourner. Il avait suffi d'envoyer aux dames désireuses de venir faire leurs derniers adieux à leurs chéris des lettres d'invitation écrites par des habitants complaisants des villages, les priant de venir passer la guerre chez eux. Et il se trouva que tous les habitants avaient dû être complaisants, car, ce 20 Août 1914, les villages regorgeaient d'invitées élégantes, parfumées, dissimulées derrière les rideaux de grosse toile rustique des maisons paysannes. Cinq, six de ces aimables dames se trouvaient parfois dans la même maison. Et les habitants, qui ne voulaient pas vendre leurs pommes de terre ou leur vin aux troupiers affamés, couchaient dans la paille pour louer avantageusement leurs lits familiaux aux belles dames qui n'y couchaient jamais seules, bien entendu.
A ma compagnie, une vingtaine de ces dames vinrent partager les loisirs de leurs époux ou amants pendant ces derniers jours. Il y eut Madame COSTE, la femme du sergent-major, une très jolie brune qui, disait la rumeur publique partageait ses faveurs entre son mari et monsieur DE VERNEUIL, riche amateur de jolies femmes. Il y eut la femme de l'adjudant BERNARD qui, elle, était donnée comme maîtresse en titre du Capitaine DAZY. Elle était jolie aussi, cette femme. Jeune, élégante, bien coiffée, elle était blonde, blonde comme la mienne de femme, qu'elle me fit regretter bien davantage encore, car j'eus le plaisir de prendre un repas en sa compagnie et celle de son mari. Et ce plaisir véritable se nuança de regrets d'être séparé de cette Manette qui pouvait soutenir la comparaison avec cette chaude et jolie blonde qu'on sentait pleine d'ardeurs !
Il y avait aussi quelques autres épouses de sous-officiers et de réservistes. Et puis quelques chics maîtresses de riches jeunes gens, dont un (j'ai oublié son nom), fils d'une grande fabrique de fonte émaillée de Donchéry, tout cousu d'or, était choyé par tout le monde à la compagnie. Quoiqu'il en soit, ce jour-là, et surtout ce soir-là, il y eut dans l'atmosphère de l'armée, une poussée sentimentale bien sensible. Un tressaillement général, amené par l'élément féminin, se manifestait par des rires nerveux, prolongés qui fusaient de toutes les ouvertures de toutes les maisons. On sentait l'approche des dernières étreintes, des derniers baisers. Ce furent, en effet, les dernières heures amoureuses pour beaucoup de ces jeunes gens qu'on ne revit plus jamais. [...]

Source : Georges HUBIN - Ma vie - Mes campagnes - Ma guerre  -  Tome V, avec l'autorisation de Michel EL BAZE

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